Introduction
Mis
à part des images insoutenables (mort de la fillette devant
les caméras en direct, des centaines de cadavres jonchant le
sol), on ne peut pas dire que les médias se soient surpassées
quant aux informations géologiques, physiques et volcanologiques
sur l'éruption elle même, d'où l'utilité d'une synthèse même
très condensée des principaux évènements qui ont fait de cette
éruption la 4ème catastrophe volcanique sur le plan mondial
(tout de suite après celle de St Pierre à la Martinique).
Éruptions historiques
Le
Nevado del Ruiz (Colombie), volcan situé sur la limite de la
plaque continentale du Pacifique, culmine à 5 321 m. Sa nature
éruptive est bien connue :
-
1350, 1570, 1595, 1623, 1805, 1826, 1828, 1829, 1831, 1833,
- 1845
: un millier de morts provoqué par des lahars, coulées de boue
provoquées par la fonte rapide des glaciers et de la neige et
composées de matériaux volcaniques (cendres, …),
- 1916.
L'éruption
de 1985
Les
premiers signes annonçant le réveil du volcan se sont manifestés
à la fin du mois de décembre 1984 par des séismes répétés d'une
magnitude de 4.
Janvier
1985 : Lors d'un survol du cratère, les scientifiques constatent
des traces d'éruptions phréatiques avec d'importants dépôts
de sels sulfureux.
Février
1985 : Visite des ingénieurs de la Centrale Hydroélectrique
de Caldas.
Mars
1985 : Premières explosions avec dégagement de vapeur dans
le cratère. Par la suite, les séismes vont s'intensifier, et
l'activité fumerollienne s'accroître.
Juillet
1985 : Lors d'une nouvelle visite, les ingénieurs de la
Centrale Hydroélectrique de Caldas remarquent un accroissement
de l'activité. Le niveau du lac dans le cratère Arenas a monté
d'un mètre. Pour les ingénieurs, ce serait la fonte du glacier
qui aurait permis la montée du niveau de ce lac.
Août
1985 : Les séismes sont localisés entre 1 et 2 km sous l'édifice
volcanique.
11
septembre 1985 : La première grande manifestation éruptive
commence : bruit important, émission de cendres, blocs de pierre
expédiés à 2 km du cratère dans les champs de neige, début d'un
lahar avec une vitesse de propagation d'une quinzaine de kilomètres
par heure ; une route sera coupée. Cette séquence éruptive cesse
le lendemain matin. Les explosions phréatiques continuent. La
cendre sort toujours en tourbillonnant du cratère et on la retrouve
une centaine de kilomètres plus loin. Des fissures nouvelles
s'ouvrent côté Ouest dans la calotte de glace. Jusqu'à la fin
du mois, l'activité évolue très peu ; seuls éléments nouveaux,
des orages électriques et une modification de la couleur du
panache.
Octobre
1985 : Une équipe se rend sur le cratère. Elle relève une
baisse d'activité. Il n'y a pas de matériaux jeunes dans le
"Téphra" 1985. Les géologues dressent une carte délimitant les
zones dangereuses et les résidents de la vallée Nord-Est sont
tenus en alerte. A son tour, une équipe de volcanologues italiens
visite les lieux. Un échantillon de gaz indique la présence
d'un fluide magmatique mais il n'y a pas de matériaux jeunes
éjectés par le cratère. D'après le rapport de mission de cette
équipe (15-22 octobre), l'explosion du 11 septembre avait un
caractère phréatique. Les volcanologues italiens soulignent
justement que la priorité pour le Ruiz est d'installer un système
de communication permettant d'alerter les populations dès qu'une
éruption commence car les risques de lahars sont grands. De
nouveaux séismes d'origine tectonique sont enregistrés à 12
km sous le flanc Nord du volcan. Puis une accalmie relative
s'installe sur l'édifice. Des apaisements de ce genre ont, dans
l'histoire, été préludes à de grandes catastrophes (NDLR : constatations
personnelles d'après récits et publications d'ouvrages spécialisés).
Les scientifiques du groupe INGEOMINAS évaluent à 60% les risques
que l'éruption entraîne des glissements de boue, à 21% des projections
de blocs et à 8% un épanchement lavique. Ils indiquent également
que la ville d'Armero pourrait être évacuée sans danger en 2
heures ... mais la récolte de café bat son plein et les gens
ne semblent pas vouloir quitter leurs plantations.
10
novembre 1985 : Départ de l'onde sonore sur 3 jours, plus
faible cependant que celle du 11 septembre. La crise sismique
est intense. Les sismographes sont saturés. Le groupe INGEOMINAS
recommande l'évacuation d'Armero (information non confirmée).
La catastrophe du
13 novembre 1985
La
première explosion a lieu vers 16 h, selon les témoins.
Vers 17
h 30, des cendres et lapillis commencent à tomber sur Armero.
Vers 20
h, la radio donne le message suivant : "Le volcan est
en éruption, il n'y a pas de danger".
Vers 22
h, la pluie de cendre augmente. La panique s'installe dans la
ville mais les évènements se précipitent : augmentation de la
crise sismique, odeur de soufre persistante, panache importante
au dessus du cratère. Les explosions teintent de rouge les nuages
environnant le sommet. Des morceaux de ponce de 15 cm et des
lapillis de 1 cm ainsi que des matériaux frais sont expédiés
sur 18 km de distance. La pluie diluvienne redouble. Un avion
de ligne se trouvant pris dans le panache de cendres s'en sort
de justesse : le pilote doit passer sa tête par le hublot pour
atterrir, les vitres étant recouvertes de ponce. Le pilote
d'un DC 8, volant à 25 000 pieds, raconte : "j'ai vu un
éclair énorme dans le ciel et puis un énorme champignon faisant
penser à l'explosion d'une bombe atomique". Cela coïnciderait
avec une explosion (souffle dirigé sur le Nord-Est vers 22 h
30). Des témoins entendent un grondement qui provient de la
rivière. Ils grimpent sur une colline, ce qui les sauvera. C'est
la première vague de boue froide, dynamisme dont la vitesse
présumée atteignit les 35 km/h. Elle se réchauffera ensuite
jusqu'à devenir brûlante. Des matériaux incandescents tombent
sur la ville.
Le lendemain
matin, Armero était recouverte d'une dizaine de mètres de boue
solidifiée. À l'ouest du Nevado del Ruiz, la ville de Chinchiná
fut également durement éprouvée. On dénombra
un total de 25 000 personnes à jamais enfouies vivantes.
Cartographie des
lahars du 13 novembre 1985
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Carte des lahars et des retombées pyroclastiques
de l'éruption de 1985.
© Réalisation : Joël Boyer d'après
un croquis de Claude Lesclingand.
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